Issue aussi bien de la Biotech Valley wallonne que du pôle flamand, FlandersBio, ou bien sûr de la capitale, l’industrie belge des biotechnologies se place aux tous premiers rangs à l’échelle européenne, sinon mondiale.
La Belgique compte plus de 140 entreprises exerçant dans ce domaine (y compris biotechs industrielles et biotechs environnementales), dont une centaine de pure players ; soit 7 % des sociétés de biotechnologie européennes. Selon les chiffres avancés par bio.be, l’association professionnelle du secteur, les sociétés belges génèrent 16 % du chiffre d’affaires de l’ensemble des biotechs européennes, et quasiment 10 % des dépenses de recherche et développement. S’agissant des biotechs thérapeutiques, leurs portefeuilles de produits sont proportionnellement plus avancés et plusieurs “premières” européennes sont l’oeuvre de firmes belges, à l’image, chez Thrombogenics, du Jetrea qui n’est rien d’autre que la toute première thérapie cellulaire homologuée en Europe.
Si l’on s’en réfère à la taille de la population de la Belgique, grosso modo équivalente à 1/6e de celle de la France, et moins de 2 % de celle de l’Europe entière, cette stature semble tenir du prodige… En réalité, le succès du plat pays en matière de biotechnologies repose sur des atouts bien connus. La Belgique abrite d’abord des institutions académiques et hospitalières de premier plan et un grand nombre de biotechs en sont des spin-off, comme c’est le cas aux USA. Historiquement, de grands groupes pharmaceutiques nationaux (UCB) ou internationaux (citons GSK) sont déjà très présents. Les gouvernements régionaux offrent des incitations fiscales, comme des déductions de charges sur les salaires des personnels de R&D. Par ailleurs, de multiples études ont démontré qu’un environnement multiculturel et multilingue constitue en dépit des frictions un facteur favorisant clairement l’innovation et la créativité – ce que la Belgique démontre du reste dans de nombreux domaines.
Enfin le nerf de la guerre ne fait pas défaut. La Belgique se classe -hors territoires particuliers type paradis fiscaux- au 3e rang mondial en termes de patrimoine financier net par habitant avec 78.300 euros par tête, devancée seulement par la Suisse et les USA (Cf. Allianz Global Wealth Report 2014, .pdf). Rien d’étonnant dès lors que les projets à risque trouvent, relativement plus facilement qu’ailleurs, les capitaux nécessaires à leur développement. Près du quart des investisseurs individuels belges interviennent ainsi sur les biotechs…
Pour mieux cerner cet engouement, nous avons interrogé Stefaan Roegiers, country manager de BinckBank Belgique – le leader du marché du courtage en ligne dans le pays. Les chiffres cités se rapportent à la tendance des sept premiers mois de l’année 2015.
BiotechBourse : À quand remonte la première cotation d’une biotech belge ?
Stefaan Roegiers, Country Manager BinckBank Belgique : L’intérêt des investisseurs belges pour les biotechnologies est bien enraciné car cela fait une vingtaine d’années que ce secteur est représenté à la Bourse de Bruxelles. La première biotech belge cotée fut Innogenetics dès 1996 [ndlr : rachetée par le japonais Fujirebio en 2010]. Depuis bon nombre d’entreprises ont suivi cet exemple à l’image d’Ablynx, Celyad, Thrombogenics… la dernière en date étant Biocartis. Aujourd’hui, ce segment du marché est véritablement devenu adulte et suscite donc beaucoup d’intérêt auprès des clients de BinckBank Belgique.
Comment cela se mesure dans les portefeuilles des particuliers ?
Stefaan Roegiers : Au total 23 % de nos clients investissent dans les actions biotechs belges, une proportion sensiblement conforme à ce qu’on observe sur l’ensemble du marché belge puisque 24 % de toutes les transactions en actions sur Euronext Bruxelles concernent les valeurs biotechnologiques. Mais il faut souligner que les clients de Binck Belgique sont aussi nombreux à s’intéresser aux biotechs françaises puisque 20 % d’entre eux détiennent des biotechs cotées à Paris… Et 19,2 % à la Bourse d’Amsterdam.
Quand on regarde notre marché domestique, dans le top 20 des actions négociées par nos clients on trouve sept actions biotechs dont Ablynx, qui n’est rien moins que la 2e valeur la plus traitée… Nous constatons bien sûr que les annonces relatives à la mise d’un produit sur le marché ou au passage d’une étage dans le processus de développement impactent immédiatement le nombre de transactions.
Valeurs les plus traitées par les clients de BinckBank Belgique ( janvier à juillet 2015)
- Nyrstar
- Ablynx
- Euronav
- KBC
- Ageas
- Thrombogenics
- Exmar
- Delhaize
- MDxHealth
- Melexis
- Anheuser-Busch InBev
- Tigenix
- Dexia
- Bekaert
- Celyad
- Umicore
- Ion Beam Applications
- CFE
- Fagron
- BPost
Comment s’explique cet engouement ?
Stefaan Roegiers : L’intérêt manifesté par les investisseurs répond d’abord à la vigueur intrinsèque de l’industrie belge des biotechnologies puisque la Belgique est l’un des leaders dans ce domaine. En outre, on constate que l’appétit des investisseurs est tout aussi marqué du côté néerlandophone que francophone ; le nombre d’entreprises de biotechnologies étant à peu équivalent de chaque côté. En termes de visibilité, les médias belges couvrent largement les avancées de ce secteur en plein essor. Il y a également un corner Biotech & Life Sciences au salon dédié aux investisseurs et aux épargnants belges, Finance Avenue.
Un autre élément contribuant à mettre en lumière les biotechnologies, c’est l’intérêt qu’y portent des investisseurs de premier plan. Ainsi Marc Coucke, l’un des principaux capitaines d’industrie chez nous, fondateur d’Omega Pharma, a investi depuis la cession de sa société dans plusieurs sociétés biotechs [ndlr : notamment au capital de Mithra].