La société de biotechnologie Genticel, dont le produit phare est un vaccin visant à prévenir les cancers induits par le virus du papillome humain, a obtenu récemment auprès de l’office américain des brevets (USPTO) un nouveau brevet, US 9095537, protègeant l’utilisation des vecteurs de délivrance d’antigènes CyaA -à l’origine de la plate-forme Vaxiclase- dans le traitement du cancer, y compris en multi-thérapie et à des stades plus avancés de la maladie.
Intitulé «Therapy of cancer based on targeting adaptive, innate and/or regulatory component of the immune response » le brevet protège une découverte réalisée au sein de l’unité de recherche Régulation Immunitaire et Vaccinologie de l’Institut Pasteur, et fait l’objet d’une licence exclusive à Genticel. Il attribue cette découverte au Professeur Claude Leclerc, la patronne de cette unité (voir ici une présentation des travaux du Prof. Leclerc) et au Dr. Pedro Berraondo Lopez, chercheur post-doc à Pasteur à l’époque du dépôt et aujourd’hui attaché au Centro de Investigación Médica Aplicada (CIMA) de l’Université de Navarre. Ce nouveau brevet couvre les thérapies anti-tumorales qui incluent une protéine CyaA recombinante comprenant l’antigène associé à une tumeur et un TLR (Toll-like receptor) agoniste chez les patients. Les TLR agonistes ont démontré des propriétés immunologiques comme adjuvants. En outre, il couvre également l’utilisation d’un vecteur de CyaA en combinaison avec des agents chimiothérapeutiques comme le cyclophosphamide, largement utilisé en combinaison avec des protocoles d’immunothérapie pour traiter certains cancers.
BiotechBourse : À quoi correspond le nouveau brevet obtenu par Genticel ?
Martin Koch, Président du directoire : Il y a deux aspects à considérer dans la délivrance de ce brevet. Le premier, c’est la volonté de Genticel, en concertation avec l’Institut Pasteur, de protéger et renforcer continuellement sa propriété intellectuelle. À ce titre, l’US 9095537 constitue une strate supplémentaire de protection pour la technologie dont Pasteur nous a octroyé la licence exclusive. Le second aspect, c’est qu’il nous permet d’ouvrir une réflexion sur de possibles applications de notre technologie à d’autres champs et d’autres stades de la maladie cancéreuse, et également d’utiliser notre plate-forme en combinaison avec d’autres médicaments.
Dans le domaine des biotechnologies, avant de se lancer dans de nouveaux développements il est indispensable de s’assurer de la propriété intellectuelle adéquate. Aujourd’hui, Genticel est uniquement focalisée sur le traitement du HPV [NDLR : papillomavirus humain], domaine où nous sommes les premiers à travailler sur la base du vecteur CyaA. Nous sommes persuadés que cette technologie offre un gisement de possibilités, mais avant de l’étendre à d’autres champs il nous importait de prouver sa pertinence clinique dans un domaine précis : c’est l’enjeu de la phase 2 en cours pour le ProCervix [NDLR : à la différence de Gardasil ou Cervarix, qui sont administrés préventivement chez des jeunes filles n’ayant jamais été en contact avec le HPV, ProCervix vise à éliminer les cellules virales chez des patientes porteuses du virus].
BiotechBourse : Vaxiclase, la plate-forme fondée sur l’utilisation du vecteur CyaA, fait déjà l’objet d’un accord avec le Serum Institute of India pour produire un composé acellulaire anticoquelucheux. Pouvez-vous rappeler l’enjeu de cet accord ?
Martin Koch : Vaxiclase est la seconde génération de notre plate-forme, avec des caractéristiques améliorées. Initialement, nous étions limités par la longueur des séquences d’antigène à introduire pour fabriquer un vaccin ; pour le HPV c’était suffisant mais désormais nous avons plus que triplé la capacité d’emport d’antigènes, ce qui étend considérablement la versatilité d’applications. Cette plate-forme à plus grande capacité a été licenciée au plus gros producteur de vaccins au monde en volume : le Serum Institute of India. Personne dans le monde ne vaccine davantage d’enfants qu’eux par exemple… Or, ils se sont rendus compte que les vaccins acellulaires contre la coqueluche, s’ils sont beaucoup mieux tolérés, sont moins efficaces que les anciens vaccins. Ce sont les propriétés antigèniques de Vaxiclase, entre autres, qui ont intéressé le SII. Pour Genticel, ce partenariat est d’abord l’occasion d’engranger des revenus bien sûr, mais surtout la possibilité d’avoir accès aux amélioration du processus de production en confiant son optimisation à l’un des meilleurs experts mondiaux du domaine, disposant des ressources à la hauteur. Nous bénéficions en effet d’un droit de retour sur les améliorations de Vaxiclase que le SII pourrait mettre au point. C’est particulièrement intéressant dans la biotech, car l’innovation thérapeutique doit s’accompagner d’un processus permettant un rendement économique lorsqu’on produit à l’échelle commerciale.