Au cours des vingt dernières années, les Big Pharmas ont fait face à la baisse de de leur rendement sur les capitaux investis. Plus que jamais, face à cette Crise des retours sur investissements, les Biotechs sont devenues leur incontournable relais de croissance.
1] Le ROIC, une mesure du rendement des capitaux investis
Le ROIC (“Return on Invested Capital“, ou bien Retour sur Capitaux Investis) mesure la capacité d’une entreprise à générer des flux de trésorerie par rapport au capital qu’elle a investi. C’est en fin de compte le rendement annualisé du capital investi (il est exprimé en pourcentage).
Le ROIC peut être utile pour un investisseur pour comparer plusieurs sociétés entre elles ainsi que pour essayer de déterminer lesquelles sont les plus compétitives.
Mais il est également utile pour évaluer la trajectoire du rendement des capitaux investis pour un secteur (on calculera alors la moyenne). Nous avons donc procédé à ce travail en analysant sur 20 ans sur l’évolution du ROIC des douze Big Pharmas.
2] Un ROIC divisé par 2 pour les Big Pharmas en 20 ans
Entre 2000 et 2019, la baisse du ROIC a été de 53% (11,7% en 2019 vs 25,0% en 2000). Autant dire que le secteur connaît un rendement des capitaux investis deux fois moins élevé en 2019 qu’il y a 20 ans.
Sur la première partie des années 2000 (entre 2000 et 2009), le ROIC moyen a été de 19,0%. Sur la deuxième partie des années 2000 (entre 2010 et 2019), le ROIC moyen est tombé à 12,0%.
Plusieurs raisons peuvent être invoquées. Tout d’abord la pression sur les prix des médicaments. Mais aussi la perte de brevets à partir des années 2010 (on appelle cela le ‘Patent Cliff‘). Enfin, la compétition s’est accrue avec l’émergence de nouveaux acteurs et on observe aujourd’hui de grandes difficultés pour le secteur à lancer des produits innovants et une carence de véritables “Blockbusters” (médicaments aux ventes de plus de 1 Milliard $ / an).
En fin de compte, cette crise du rendement des capitaux investis s’est installée. Si bien qu’ au cours des dernières années, le ROIC d’une Big Pharma a tourné autour de 10% en moyenne ce qui complique les perspectives de rendements pour les actionnaires.
3] Les Big Pharmas sont à la peine… les Biotechs comme joker
Lorsqu’on étudie plus en détail la trajectoire du ROIC de chacune des Big Pharmas, on constate que peu échappent à la chute du retour sur capitaux investis. La seule solution est de trouver à l’extérieur des programmes thérapeutiques d’intérêt.
En 1999, aucune Big Pharma n’avait de ROIC inférieur à 10%. En 2009, ce chiffre progressait fortement pour compter 4 Big Pharmas avec un ROIC inférieur à 10%.
En 2019, ce chiffre est maintenant de 7 Big Pharmas avec un ROIC inférieur à 10%. Autrement dit, le secteur connaît de plus en plus de difficultés en terme de retour sur investissements.
Pour autant, certaines sociétés s’en sortent mieux que d’autres. Ainsi, 6 Big Pharmas ont un ROIC supérieur à 15% en 2019: ABBVIE (26.7%), ROCHE (23.0%), AMGEN (20.9%), ELI LILLY (17.1%), MERCK & CO. (17.0%) et JOHNSON & JOHNSON (15.3%).
Les 5 Big Pharmas ayant le mieux résisté voir même gagné en compétitivité ces dernières années ont été ABBVIE, AMGEN, ELI LILLY, MERCK & CO., et ROCHE. Ci-dessous, nous présentons un classement des ROIC, par décennie.
Il n’en demeure pas moins que mis à part une exception, l’ensemble des autres Big Pharmas dispose d’un ROIC inférieur en 2019 à celui de ce 1999. Alors que celui de ROCHE a progressé de 12 points sur la période, les autres Big Pharmas ont leur ROIC qui a baissé de 12 points en moyenne.
Seulement 4 Big Pharmas ont un ROIC supérieur en 2019 à celui de 2004 (ELI LILLY, AMGEN, MERCK & CO. et ROCHE) et seulement 2 Big Pharmas ont un ROIC supérieur en 2019 à celui de 2009 (MERCK & CO. et ROCHE).
Cette étude nous montre que les Big Pharmas ont donc perdu en compétitivité par rapport aux niveaux d’il y a 10, 15 et 20 ans.
Pour autant, sur 5 ans (de 2014 à 2019), 8 Big Pharmas ont un ROIC supérieur en 2019 à celui de 2014… et il s’agit des sociétés ayant été particulièrement actives en matière d’acquisitions de sociétés Biotechs.
Autrement dit, et même si elles sont de plus en plus volontaristes sur le terrain des Licences et des Acquisitions, le seul salut des Big Pharmas ne pourra venir que d’une stratégie offensive visant à jouer la carte de l’innovation et à acquérir des actifs compétitifs.
Au premier rang de ces cibles de choix, capables de transformer leur trajectoire, on compte évidemment les Biotechs qui constituent plus que jamais leur joker idéal…