C’est à la fois un réel espoir pour les personnes atteintes par la maladie de Charcot (ou sclérose latérale amyotrophique, SLA) et un jalon majeur pour le masitinib, de la biotech française AB Science. Un essai de phase 2/3 comparant cette nouvelle molécule associée au seul traitement disponible, le Rilutek, a montré une efficacité statistiquement significative par rapport au Rilutek seul.
Médiatisée par la campagne “Ice Bucket Challenge“, la sclérose latérale amyotrophique (SLA) appelée également maladie de Charcot ou encore maladie de Lou Gehrig aux Etats-Unis est l’une des maladies neurologiques les plus connues. Entraînant une dégénérescence des motoneurones, la SLA conduit à une paralysie progressive, fatale à long terme dans la plupart des cas (90 % des patients ne survivent pas plus d’une décennie) même si des cas de survie prolongée sont connnus, notamment celui du physicien britannique Stephen Hawking atteint depuis sa jeunesse d’une forme débutant précocément, mais d’évolution lente. Et malheureusement, la maladie laisse les praticiens démunis. Le seul traitement disponible est le riluzole (commercialisé par Sanofi sous la marque Rilutek), qui ne permet qu’une prolongation de quelques mois de la survie moyenne.
AB Science a choisi de tester une approche à base de masitinib, sa molécule phare, sur la base de recherches suggérant que la SLA résulte d’interactions entre différents types de cellules (cellules microgliales, mastocytes et astrocytes) délétères pours les neurones moteurs. Le masitinib cible à la fois les mastocytes et les cellules microgliales et s’est montré, dans des modèles animaux, capable de réduire la mort et l’atrophie des motoneurones. Le mécanisme d’action principal du masitinib est de réguler l’activation anormale des cellules gliales par l’inhibition d’un récepteur appelé CSF-1R. Par ce ciblage, le masitinib est capable d’inhiber la prolifération et l’activation des cellules gliales, notamment des phénotypes anormaux qui entrainent la destruction des motoneurones.
Restait encore à en vérifier l’efficacité chez l’homme. Si les résultats complets ne sont pas encore disponibles, AB Science a toutefois d’ores et déjà annoncé que l’étude AB10015 comparant l’efficacité et la tolérance du masitinib en association avec le riluzole (contre placebo + riluzole) chez des patients atteints de sclérose latérale amyotrophique avait atteint son critère principal d’efficacité, de façon statistiquement significative (p-value < 0,01 dans la population en intention de traiter, c’est-à-dire sur l’échantillon des patients ayant commencé l’étude en considérant les éventuels abandons comme des non-répondeurs).
Le critère d’évaluation principal de l’analyse intérimaire était basé sur l’évolution du score Functional Rating Scale de la Sclérose Latérale Amyotrophique (ALSFRS-R) après 48 semaines de traitement. Le score ALSFRS-R est l’outil d’évaluation recommandé en tant que critère d’évaluation par les agences règlementaires américaine et européenne dans le cadre d’une demande d’enregistrement.
AB Science précise que l’étude est également positive s’agissant des critères secondaires, l’évolution du score Forced Vital Capacity (FVC) ainsi que le score Combined Assessment of Function (CAFS).
“Les données non cliniques ont montré que le masitinib était efficace sur des modèles animaux de la sclérose latérale amyotrophique, en bloquant la prolifération des cellules gliales, et ainsi en réduisant l’atrophie des motoneurones. Les résultats positifs de cette étude clinique démontrent que ce nouveau mécanisme d’action est pertinent pour le traitement de la SLA chez l’homme”, s’est réjoui le professeur Olivier Hermine, Chef de service d’Hématologie de l’hôpital Necker-Enfants Malades, co-fondateur et président du comité scientifique d’AB Science.
“Les résultats positifs de cette étude dans la SLA sont une étape significative dans le développement du masitinib en neurologie. Nous allons partager ces données avec l’EMA et la FDA afin de discuter de la possibilité de déposer un dossier d’enregistrement pour une autorisation de mise sur le marché du masitinib dans la SLA”, a précisé pour sa part Alain Moussy.
Pour la première fois, AB Science tient la preuve clinique de l’efficacité du masitinib dans une maladie neurologique, ce qui représentait un véritable défi. Il faudra bien sûr attendre la publication des données complètes (une webconférence est annoncée dans les prochains jours) pour apprécier véritablement la portée des résultats mais compte tenu d’un profil de sécurité favorable, n’accroissant visiblement pas les effets secondaires par rapport au Rilutek seul, du statut déjà obtenu de médicament orphelin, et de l’importance du besoin médical, la voie vers l’homologation du masitinib dans la SLA est bien tracée.
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