Que faire en regard d’une patiente porteuse du HPV, ce virus du papillome humain, susceptible dans 90 % des cas de ne provoquer qu’une infection passagère, mais dont certaines souches peuvent avec le temps entraîner des lésions génitales pouvant mener à un cancer ? Aujourd’hui la réponse est loin d’être tranchée ; la plupart du temps la procédure est d’informer la patiente qu’elle présente un risque potentiellement plus élevé, sans exagérer le problème puisqu’une régression spontanée est fréquente (même pour les souches les plus virulentes) et qu’il existe des moyens de dépister les états précancéreux où il faut alors intervenir. Bref, attendre et voir venir, en espérant que l’infection disparaisse d’elle-même en un ou deux ans.
Dès lors, différencier les femmes à fort risque de développer un cancer du col de l’utérus (99 % des cancers invasifs du col sont dûs à une infection HPV) de celles à faible risque permettrait de mieux adapter le suivi et le traitement préventif de ces patientes.
Dans ce cadre, le Centre Hospitalier Universitaire de Reims en partenariat avec la société Genomic Vision a lancé une étude clinique visant à valider l’intégration du papillomavirus humain à haut risque (comme les types 16 et 18, deux souches du virus responsables à elles seules de 70 % des cancers du col de l’utérus) comme indicateur pertinent de la progression des lésions cervicales vers un cancer. Cette étude prospective multicentrique nommée IDAHO (Intégration de l’ADN des HPV Oncogènes), menée sur 3.500 patientes, implique 11 centres hospitaliers référents dans le domaine de la gynécologie.
Cette étude a pour objectif de valider l’intégration de l’ADN des HPV à haut risque (HPV-HR) dans le génome des patientes comme indicateur de sévérité des lésions. Cet indicateur permettra également d’identifier les lésions à haut risque de progression vers un cancer du col de l’utérus. La technique du peignage moléculaire de Genomic Vision est aujourd’hui la seule qui permet de détecter l’intégration des HPV-HR de manière directe et à haute résolution, comme l’ont montré les données présentées par Genomic Vision à l’avant-dernière conférence International Papillomavirus Conference & Clinical Workshop, en 2014.
Les HPV-HR représentent le seul facteur de risque indépendant de cancer du col de l’utérus, qui est le deuxième cancer le plus fréquent chez la femme, avec près de 500.000 nouveaux cas et 250.000 à 300.000 décès recensés chaque année à travers le monde. Des chiffres difficilement acceptables alors que, du fait de son évolution lente (8 à 20 ans après l’infection), ce cancer peut être prévenu par le dépistage et le traitement des lésions précancéreuses.
Cependant, le dépistage repose essentiellement sur le frottis cervico-utérin et des tests de détection de l’ADN ou de l’ARN viral (tests HPV comme le Cervista de Hologic). Le frottis cervico-utérin manque de sensibilité (trop de lésions échappent à l’examein) alors que les tests HPV, bien que très sensibles, manquent de spécificité (ils génèrent trop de “faux positifs”). Ceci génère des examens cliniques inutiles, invasifs et coûteux ainsi que des sur-traitements pouvant notamment entraîner avoir des effets délétères sur les éventuelles grossesses futures.
« L’enjeu de l’étude IDAHO est de pallier cette insuffisance de diagnostic en identifiant un biomarqueur permettant de différencier spécifiquement les femmes à fort risque de développer un cancer du col de l’utérus et nécessitant un traitement de celles à faible risque qui ont besoin d’un suivi adapté, » a expliqué le Professeur Olivier Graesslin, Responsable du service de gynécologie-obstétrique du CHU de Reims et coordinateur de l’étude.
L’essai comprendra une première phase transversale jalonnée par le recrutement des 3.500 patientes. Débutant ce mois-ci et d’une durée de trois ans, elle a pour objectif de démontrer que l’intégration d’HPV est un biomarqueur diagnostique des lésions précancéreuses à haut risque, nécessitant une prise en charge immédiate et un traitement. La deuxième phase suivra pendant trois ans supplémentaires les patientes positives à l’infection par HPV qui présentent des lésions précancéreuses à plus faible risque, afin de valider que l’intégration de l’ADN d’HPV est un biomarqueur de l’évolution des lésions précancéreuses.
“Cette étude clinique qui implique onze centres hospitaliers français de renom est la plus vaste étude à laquelle Genomic Vision participe et reflète le besoin de la communauté médicale pour le développement de tests de dépistage du cancer du col de l’utérus plus performants. La qualité des partenaires de ce consortium nous rend très confiants quant aux résultats de notre collaboration. Une fois validé, notre test HPV devrait augmenter l’efficacité du diagnostic et permettre ainsi une meilleure prise en charge des patientes, en évitant des colposcopies et des traitements inutiles, invasifs et coûteux”, a de son côté fait valoir Aaron Bensimon, le Président du directoire de Genomic Vision.
L’affiche de ce nouveau partenariat académique chez Genomic Vision suit de peu l’annonce d’un partenariat avec l’Insitut Imagine, le plus grand pôle européen de recherche et de soins dans les maladies génétiques, installé à l’Hôpital Necker-Enfants malades.
Ces annonces, dont l’impact direct dans les comptes de la société n’est pas significatif, ne contentent pas pour autant les investisseurs avec un titre Genomic Vision au plus bas historique. Introduite en milieu de fourchette à 15 euros en avril 2014, à l’issue d’une opération très largement sursouscrite, l’action n’a que très rarement évolué en plus-value par rapport à ce prix. Et à mesure que la fin d’année se rapproche, le marché doute que Genomic Vision parvienne à respecter son’objectif de lancer au quatrième trimestre 2015 un test de prédisposition au cancer du sein (via la détection de mutations délétères du gêne BRCA1 et 2) présenté comme un potentiel blockbuster.
Ce test doit en principe être lancé au Etats-Unis par Quest Diagnostic, leader du secteur et actionnaire minoritaire de GV. Cependant, en dehors de l’annonce en février dernier du renouvellement pour trois ans du partenariat entre les deux entreprises, à des conditions quelque peu amendées (un taux de royalties plus important pour la société française, mais des milestones revus à la baisse), peu d’indications ont été fournies sur l’avancée du lancement du test BRCA.
Actuellement, le titre Genomic Vision affiche presque 40 % de repli par rapport à son prix d’introduction. Ironiquement, le cours approche même le prix auquel le patron de la société M. Bensimon a exercé en juin 2015 pour 50.000 euros de BSPCE (somme équivalent à un tiers du montant de sa prime perçue pour le succès de l’introduction en Bourse), soit environ 8,58 euros.