De la parole aux actes. La société tricolore Cellectis (ALCLS), fondée en 2000 et introduite sur Alternext en 2007, a déposé le 20 février auprès du gendarme américain des marchés financiers son document d’enregistrement en vue de son introduction au Nasdaq. Le dépôt de ce document donne le véritable coup d’envoi du processus de cotation outre-Atlantique. Cellectis en avait évoqué le projet le 8 janvier dernier.
Le fameux formulaire « F-1 » de Cellectis est désormais consultable par l’ensemble des investisseurs américains potentiels sur le site de la Securities and Exchange Commission. Les banques chargées de l’opération sont toutes américaines : Merrill Lynch, Jefferies, Piper Jaffray, Oppenheimer & Co. et Trout Capital. À l’occasion de son entrée au Nasdaq, l’entreprise spécialisée dans l’ingénierie des génomes émettra un nombre à définir d’ADS (American Depositary Share), chaque ADS représentant une action ordinaire. Les ADS Cellectis recevront le ticker CLLS (ALCLS pour l’action cotée à Paris). Conformément à la législation américaine, la société observera une période de black-out de 21 jours avant de démarrer son road-show et de préciser les conditions de l’opération.
Néanmoins, il est indiqué que le montant des titres offerts par Cellectis pourrait atteindre 115 millions de dollars au maximum. Les fonds levés viendront financer le développement des produits de Cellectis en immuno-oncologie (à commencer par UCART 19, qui fait déjà l’objet d’un partenariat avec Servier pour un montant qui pourrait totaliser 850 millions de dollars toutes indications confondues), mais aussi ses projets dans d’autres domaines thérapeutiques ou encore dans la biotechnologie agricole.
Dans son argumentaire sur cette prochaine IPO, Cellectis met avant tout l’accent sur les fameux CAR-T, un type de thérapie cellulaire fondé sur des lymphocytes T modifiés à l’aide de Récepteurs Antigéniques Chimériques.
« Nos produits candidats, fondés sur des cellules T aux gènes sélectivement modifiés, et qui expriment des récepteurs antigéniques chimériques, ou CARs, visent à exploiter la puissance du système immunitaire pour cibler et éradiquer les cancers. Nous pensons que l’immunothérapie fondée sur les CARs est l’un des domaines les plus prometteurs de la recherche sur le cancer, et qu’elle représente un nouveau paradigme pour le traitement du cancer. Nous concevons la prochaine génération d’immunothérapies par cellules CAR T avec des gènes modifiés de façon ciblée. Nos technologies de ciblage génique nous permettent de créer des cellules CAR T allogéniques, ce qui signifie qu’elles proviennent de donneurs sains plutôt que des patients eux-mêmes. Nous pensons que la production allogénique de cellules CAR T nous permettra de développer des produits rentables « sur étagère » pouvant être stockés et distribués dans le monde entier. Notre expertise en matière de modification ciblée des gènes nous permet également de développer des produits candidats qui présentent des attributs supplémentaires en matière d’innocuité et d’efficacité, y compris des éléments de contrôle conçus pour empêcher les cellules CAR T d’attaquer les tissus sains, pour leur permettre de tolérer des traitements de référence en oncologie, et de les équiper pour résister aux mécanismes qui inhibent l’activité du système immunitaire », indique le communiqué de Cellectis.
On se souvient que les CAR-T suscitent un énorme engouement au vu des résultats spectaculaires obtenus lors de récents essais cliniques. Au cours du congrès de la Société américaine d’hématologie (ASH) de décembre 2014, les laboratoires Kite Pharmaceuticals et Novartis ont notamment fait état de taux de rémission de l’ordre de 90 % dans des essais auprès de personnes atteintes de leucémie et qui subissaient une rechute après avoir reçu le traitement habituel.
Les quelques sociétés cotées disposant de projets estampillés CAR-T atteignent d’importants niveaux de valorisation. Kite Pharma, dont le traitement KTE-C19 a obtenu le statut de médicament orphelin et annoncé lundi un accord à 525 millions de dollars avec Amgen, pèse 2,63 milliards de dollars et Juno Therapeutics 4,12 milliards de dollars. Introduite sur le Nasdaq le 19 décembre dernier seulement, cette société compte trois projets cliniques à base de cellules CAR-T.
Après une année 2014 sur les chapeaux de roue, on observe que le rythme des introductions tend à ralentir avec 24 IPO menées à bien à Wall Street depuis le début de 2015, selon Renaissance Capital, soit 31,4 % de moins que l’an passé à la même époque (seules les opérations supérieurs à 50 millions de dollars de capitalisation sont recensées). Dans le lot, 13 concernaient des entreprises du secteur de la santé, qui reste ainsi le plus actif.